Tout d'abord, mettons quelques détails au point : ma recherche d'emploi a commencé par une phase "passive" consistant simplement à refaire mon CV et à le poster sous une forme ou sous une autre sur des sites de recherche d'emploi. J'ai ensuite été noyé sous les propositions, surtout les premiers jours. Il est important ici de noter le sens de la démarche : en mettant mon CV en ligne, "j'offre" mes services et les recruteurs qui me contactent sont "demandeurs". Ceci a son importance pour la suite des évènements...

Dans la liste des coups "foireux", on trouve pêle-mêle :
  • Les RH qui ne cherchent qu'à remplir leurs "viviers" de CV
  • On les reconnaît facilement : ils établissent le contact sur le mode "J'ai pris connaissance de votre CV sur le site de Monster, votre profil a retenu notre mon attention, je pense que vos expériences et vos connaissances vous permettront, avec nos projets, de trouver une suite intéressante à votre carrière.", s'empressent de vous demander votre CV et ne vous parlent plus dès lors.

  • Les rendez-vous "suceurs de moelle"
  • On vous convie à un entretien RH au cours duquel on vous demande les noms et numéros de vos anciens responsables, soi-disant pour vérifier vos expériences. Une fois l'entretien passé, vous n'aurez plus de nouvelles, mais vos anciens responsables sont entrés dans le carnet d'adresse de la SSII en tant que prospects protentiels.

  • La "vente aggressive" de CV
  • Grand chef-d'oeuvre du marketing. Le concept est relativement simple. A la base, il faut rappeler le modèle économique de la SSII : elle "loue" les services d'un consultant à une boîte (d'où les appellations péjoratives mais souvent justifiées de "vendeurs de chair humaine", "viandeurs", "viandards" et autres.) Pour que le système soit ultra rentable, il faut que les consultants (qui sont payés par les SSII) soient le plus souvent en mission et le moins souvent en "intercontrat" (période entre deux missions). Et ça commence dès l'embauche. Imaginons qu'une SSII reçoive un appel d'offre sur une mission pour laquelle elle n'a pas de consultant sous la main. Elle va donc mener un recrutement "flash" pour trouver un consultant et le proposer. Ce qui amène des effets pervers. Par exemple, le candidat peut se retrouver en entretien avec le client alors qu'il n'a pas encore signé de contrat d'embauche. S'il est pris tant mieux, sinon, ben pas d'embauche. Autre effet secondaire : vous avez postulé auprès de deux SSII répondant au même appel d'offre (ça, vous ne le savez pas et elles non plus) mais vous n'avez encore signé nulle part. Le client va recevoir deux fois votre CV de deux boîtes différentes. Effet négatif garanti : le client va croire que vous mangez à tous les râteliers alors que vous êtes simplement victimes des agissements douteux des SSII...

  • Et bien d'autres que je détaillerai (éventuellement) une autre fois...




Et dans la liste des comportements non professionnels (en plus de la liste ci-dessus) on trouve :
  • Tout ce qui a trait à un manque de rigueur professionnelle
  • Ceci inclut les mails bourrés de fautes d'orthographe, les sites web au design et/ou à l'orthographe approximatifs, les retards aux rendez-vous (Il ne faut pas oublier que certains candidats montent spécialement de province pour répondre à la demande du recruteur), ...

  • L'absence de respect envers le candidat
  • Envoyer un email-type avec un texte standard pré-formaté demandant de contacter telle ou telle personne et signé par une entité abstraite (L'équipe de nom_de_la_boite) est la meilleure façon de me considérer comme un candidat anonyme, simple variable potentielle d'accroissement de gains pour l'entreprise. J'ai effectivement une attitude de mercenaire vis-à-vis des SSII (je me bats simplement avec les armes de mes adversaires) donc je peux de ce fait être considéré comme un "capital commercial". Mais on n'attire pas un mercenaire avec ce genre de méthode. Ca marcherait mieux avec de l'argent, mais c'est précisément ce que les SSII (et particulièrement les grosses) ne savent (ou ne veulent) pas faire.

  • Ne pas lire les CV
  • Proposer un poste de développeur Java à un candidat ayant une expérience dans ce domaine est une aberration sans nom si ledit candidat a indiqué dans ses objectifs vouloir faire du Conseil en Stratégie.
    Dans le même genre, j'ai été contacté par une boîte de progiciels orientés finances de marché. Je pense que le RH a vu "Java" dans mes expériences. Sa boîte fait du Java. Donc je peux être intéressé. Même si l'intitulé du CV, la dernière expérience en date, la dernière formation achevée et la lettre d'intention parlent de tout sauf de Java...

  • Les bourdes
  • Example lors d'un échange de mail :

    Premier contact
    Monsieur,

    Suite à la diffusion de votre CV sur le site Monster ; celui-ci a retenu notre attention.

    N'ayant pas réussi à vous joindre, je vous informe que je suis Responsable Recrutement XXXXX pour le secteur Public & Transport. Votre parcours professionnel m'intéresse et j'aurais souhaité m'entretenir avec vous à ce sujet, par rapport à des opportunités que nous avons à pourvoir. Pourriez-vous me rappeler au 01 XX XX XX XX.

    Dans l'attente de votre appel,

    Cordialement,
    Sonia Bxxxxxx
    XXXXXXX
    Recrutement Secteur Public & Transport
    Réponse envoyée
    Bla bla bla

    Etant actuellement au Canada jusqu'en Août, je ne peux malheureusement vous proposer que l'email pour communiquer.

    Bla bla bla
    Retour de mail
    Bla bla bla

    Serait-il possible de vous joindre par téléphone (si oui quelle heure française) ?

    Bla bla bla
    Il est évident que si je n'ai malheureusement [...] propos[é] *QUE* l'email pour communiquer c'est que je ne suis pas (ou ne souhaite pas être) joignable par téléphone. Non ?

    Autre exemple :
    Bonjour,

    J'ai reçu votre candidature par le biais du cite MONSTER.
    Merci de vous retourner votre CV sous format WORD.
    J'ai un poste à vous proposer dans le secteur des systèmes et réseaux en finance.

    Dans l'attente de votre retour,

    Je me tiens à votre disposition,

    Cordialement,

    Caroline Txxxxx
    Ingénieur Commerciale
    XXXXXXXXXX
    Vous avez noté le lapsus à la deuxième ligne (en gras) ? Et si ce n'était que ça... Vous je ne sais pas, mais moi je me sens traité comme un domestique, là. (Et ça sent le "vol" de CV) Ca leur ferait mal de décrire succinctement le poste ? Et surtout que je n'ai PAS posé de candidature. J'ai simplement mis mon CV en ligne. Jolie mentalité du recruteur...
    Et pour la petite info, cette société a un des feedbacks les plus pourris que je connaisse sur le Net. On se demande pourquoi...

  • Les "Bonjour, viendez vous inscrire sur mon site de recrutement"
  • Le mail s'accompagne généralement d'un lien vers le site (mais pas toujours !) et promet des opportunités "récurrentes que nos clients nous missionnent" ainsi qu'un "suivi pertinent de votre dossier". Le racolage, c'est pas interdit par la loi ? :-D

  • Le manque de motivation
  • Les mails de deux lignes du style :
    Monsieur,

    Suite à votre candidature parue sur le site de Monster, je souhaite vous contacter dans le cadre d’une opportunité professionnelle.

    Vous pouvez me joindre au 01 XX XX XX XX.

    Cordialement.

    Myriam Kxxxxxx
    Chargée de recrutement
    Avec une signature ne contenant même pas l'URL du site web de la boîte, ça ne donne pas vraiment envie de m'y intéresser.

  • L'incapacité de planifier un rendez-vous plus d'un mois à l'avance
  • J'ai commencé ma recherche d'emploi autour du 20 Juin avec une disponibilité pour les entretiens à partir de début Août. Je me suis fait répondre une ou deux fois que c'était trop tôt pour planifier un entretien et qu'on aviserait vers mi-Juillet. Ceci est un exemple typique d'un mode de pensée réactif. Malheureusement, la tendance actuelle est plutôt basée sur une approche proactive...

    Dans le même genre, j'ai eu droit (en réponse au fait que je suis au Canada jusqu'en Août) à "Je me permettrais donc, au vue de ces informations, de vous recontacter début Août afin que l'on fasse un point sur votre situation et que l'on discute des opportunités que nous pourrions être amené à vous proposer..." Ceci est peut-être en revanche une manifestation du concept de "vente aggressive de CV" décrit précédemment. Traduisez : "On vous remettra le grappin dessus dès que vous serez disponible."

  • La pêche au gros / la pêche au harpon
  • Dans ces deux variantes le recruteur espère inverser les rôles. Son mail n'est pas une demande d'information, c'est une demande contact. L'accroche ressemble vaguement à "On est une société trop bien, on a besoin de gens cools pour des missions géniales, contactez-nous." L'objectif inavoué (inconscient ?) et d'inverser le rapport de force psychologique pour mettre le candidat en situation de demande, donc d'infériorité.
    La pêche au gros consiste à un envoyer un email-type, le plus générique possible, à une sélection de candidats. Les RH les plus fins (lol, sic) mettent les destinataires en copie invisible, les autres étalent leur volonté d'uniformisme en laissant les destinataires en clair.
    La pêche au harpon, c'est la même chose, mais sur un seul candidat à la fois. Souvent, pour un maximum d'efficacité (espérée) sans se prendre la tête (ou parce qu'il envoie énormément de mails tous azimuts sans vérifier), le recruteur envoie plusieurs fois le même mail au même candidat, à la faute d'orthographe près.

  • Les offres à tiroirs
  • Un petit exemple vaut mieux qu'un long discours : jetez un oeil ici. En gros, c'est une boîte d'intérim qui recrute pour une SSII qui recrute pour un client final qui a un poste à pourvoir. C'est le genre d'annonce qui ne remporterait pas le prix de la proposition la plus alléchante...

  • Le pipeautage symphonique
  • Il faut arrêter de prendre les Bac+5 pour des buses. Et particulièrement les ingénieurs, même si effectivement, certains en sont de grosses. Le pipeautage, on connait : on s'en sert nous-mêmes à tour de bras à un moment ou à un autre de nos études quand on est un peu légers sur un projet ou une soutenance. Alors il est inutile d'essayer de nous baratiner sur les qualités de votre entreprise. Un(e) RH qui joue La Flûte Enchantée, ça se voit et ça s'entend à 20 kilomètres. Soyez honnêtes, vous embaucherez peut-être moins facilement, mais vous aurez une bien meilleure image de marque. N'oubliez pas qu'avec l'avènement d'Internet, il existe des dizaines de façon de se renseigner sur les entreprises, à tous les niveaux : comptable, environnement de travail, intérêt des missions, ambiance, rémunération... Nous fréquentons assidûment ces moyens d'information et nous y contribuons de manière intensive. Comme dirait Tyler Durden : "Don't fuck with us."
En conclusion, certains recruteurs devraient se rappeler qu'en ces temps d'embellie du marché ils n'ont plus droit de vie ou de mort sur une embauche et que les candidats (a fortiori ceux qui ont de bons profils) croulent sous les offres de SSII. Déjà que les SSII sont généralement loin d'être des entreprises de rêve où on souhaite faire carrière, un contact minable ne donne pas envie de s'investir dans le processus de recrutement.

Enfin, je vous invite à visiter cette page sur le site de Boris Schapira qui est encore plus exigeant que moi 8-)

PS : Les extraits de mails et citations sont en "Français bourré de fautes d'orthographe" dans le texte. Je n'ai rien modifié en dehors des données personnelles.